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Rôle des thiorédoxine réductases TrxR1 et TrxR2 dans la pathogénèse des infections à Scedosporium apiospermum
Axe de recherche : Infection Délégation territoriale : Sarthe-Anjou-Mayenne Domaine de recherche : Recherche fondamentale
Porteur du projet : Nicolas PAPON
Contexte :
Les poumons des patients atteints de mucoviscidose sont fréquemment colonisés par des microorganismes qui peuvent provoquer des infections respiratoires. Les bactéries et spores fongiques inhalées sont piégées dans le mucus où elles trouvent un environnement favorable à leur développement. Scedosporium apiospermum est un champignon filamenteux qui colonise fréquemment les voies respiratoires. En raison de sa capacité à disséminer en l'absence de défenses immunitaires et de sa faible sensibilité aux antifongiques actuels, la colonisation des voies respiratoires par ce champignon compromet souvent les chances de succès d'une transplantation pulmonaire. Il est donc nécessaire d'améliorer le dépistage de ce champignon, mais aussi de découvrir de nouveaux traitements plus efficaces, ce qui nécessite une meilleure connaissance des mécanismes à l’origine du pouvoir pathogène de ce champignon.
Objectifs :
Notre projet vise à caractériser deux gènes de Scedosporium apiospermum qui produisent des enzymes appelées thiorédoxine réductases (TrxR1 et TrxR2), potentiellement impliquées dans la capacité du champignon à échapper à la réponse immunitaire de l’hôte. Plus précisément, nous tenterons de démontrer en utilisant diverses technologies que TrxR1 et TrxR2 sont utilisées par Scedosporium apiospermum pour contrer les attaques du système immunitaire auxquelles il doit faire face lorsqu’il infecte les voies aériennes des patients atteints de mucoviscidose. En supprimant, grâce à nos outils génétiques, la capacité de Scedosporium apiospermum à produire les thiorédoxine réductases TrxR1 et TrxR2, nous essayerons de démontrer que l’absence de ces deux enzymes rend le champignon inoffensif. L’ensemble de ces expériences permettra donc de montrer que les thiorédoxine réductases TrxR1 et TrxR2 sont indispensables à Scedosporium apiospermum pour coloniser les voies respiratoires et engendrer une infection.
Perspectives :
De nouvelles cultures sont en cours afin de valider les transformants NRPS1Δ par Southern-blot, et les transformants TRXR1Δ par qPCR et Southern-blot, de même que les expériences de Laser néphélométrie pour évaluer la sensibilité des mutants KU70Δ/NRPS2Δ aux générateurs de radicaux oxygénés.
Les répercussions de l’invalidation des gènes TRXR1 et TRXR2 sur la phagocytose des spores par les macrophages et leur devenir dans les macrophages (mort intra-cellulaire ou survie ?), seront investiguées par cytométrie en flux.
L’expression des gènes TRXR1 et TRXR2 chez les doubles mutants KU70Δ/TRXR2Δ et KU70Δ/TRXR1Δ incubés en présence de générateurs de radicaux oxygénés (hydroxyde de cumène, diamide ou ménadione) sera évaluée par PCR quantitative après rétro-transcription afin d’explorer l’hypothèse d’une compensation de l’absence de TRXR1 ou TRXR2 par l’autre thiorédoxine ou par la peroxyrédoxine. De même, l’expression des autres gènes des clusters centrés sur NRPS1 et NRPS2 sera évaluée en présence de ces générateurs de radicaux oxygénés afin de différencier un rôle direct des thiorédoxine réductases (via la régénération des thiorédoxines) ou indirect (via la production de métabolites secondaires de type gliotoxine).
Enfin, en collaboration avec le Dr. Véronique Eparvier (Institut de Chimie des Substances Naturelles, UPR 2301, Gif-sur-Yvette), nous définirons les conditions de culture optimales pour la production des métabolites secondaires produits par les deux clusters de gènes comprenant les gènes TRXR1 ou TRXR2. En particulier, nous étudierons l’influence du zinc sur la production de ces métabolites en analysant le métabolome de la souche parentale cultivée en milieu carencé en zinc, ou à l’inverse en présence d’un excès de zinc. Il est en effet démontré que la production de différents métabolites fongiques est stimulée dans un milieu carencé en zinc. Une fois ces conditions de culture définies, la comparaison de la souche parentale KU70Δ et des doubles mutants KU70Δ/NRPS1Δ nous permettra de confirmer nos prédictions bioinformatiques par la mise en évidence de pics correspondants aux boydines chez la souche parentale et leur absence chez les doubles mutants KU70Δ/NRPS1Δ, mais surtout ces mêmes expériences conduites sur les doubles mutants KU70Δ/NRPS2Δ nous permettront de déterminer la nature exacte du métabolite secondaire produit par l’enzyme NRPS2.
Résultats obtenus :
A ce jour, nous avons invalidé grâce à la technique CRISPR-Cas9, les quatre gènes prévus TRXR1, TRXR2, NRPS1 et NRPS2, et les transformants obtenus ont été vérifiés par PCR ciblant le locus d’intérêt. L’absence d’insertion ectopique a été vérifiée par qPCR ciblant le gène HPH pour les transformants TRXR2Δ, NRPS1Δ et NRPS2Δ, ce qui a permis la validation de 8, 5 et 3 mutants, respectivement. Les transformants TRXR2Δ et NRPS2Δ ont également été validés par Southern-blot, avec des résultats superposables à ceux obtenus par qPCR, ce qui nous conduit à envisager une première publication. Enfin, l’impact de l’invalidation du gène TRXR2 sur la protection du champignon vis-à-vis du stress oxydant a été investigué. Parmi les générateurs de radicaux oxygénés, seul l’hydroperoxyde de cumène altère la croissance des mutants TRXR2Δ comparés à leur souche parentale. Ces mutants semblent également avoir une sensibilité plus faible aux agents de stress pariétal, ce qui pourrait être en lien avec les modifications de l’ultrastructure de la paroi fongique observées en microscopie électronique à transmission, plus précisément l’absence de la couche pariétale externe.