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Expansion du répertoire de phages à usage thérapeutique contre les variants lisses et rugueux de Mycobacterium abscessus dans la mucoviscidose

Dernière mise à jour 19.07.2024 à 10h43

Axe de recherche : Infection Délégation territoriale : Languedoc-Roussillon Domaine de recherche : Recherche fondamentale

Porteur du projet : Laurent KREMER

Contexte :
Mycobacterium abscessus est responsable d’infections pulmonaires sévères qui sont très difficiles à éradiquer du fait de la résistance naturelle de cette bactérie aux antibiotiques ainsi que des rechutes fréquentes observées après traitement. De nouvelles alternatives thérapeutiques sont donc requises pour traiter ces patients. L’utilisation des bactériophages, capables de lyser des bactéries, pourrait être implémentée lorsque le traitement par l’antibiothérapie classique demeure inefficace, une situation décrite lors de complications respiratoires causées par M. abscessus dans la mucoviscidose. Ce projet vise à caractériser de nouveaux phages, actifs notamment sur les souches lisses de M. abscessus, et d’étudier les mécanismes de résistance mis en place par les bactéries contrer le processus infectieux. Ce projet a pour objectif d’étendre le répertoire de phages thérapeutiques pour permettre à davantage de patients de pouvoir bénéficier d’un traitement phagique.

Objectifs :
Les traitements contre les infections respiratoires à M. abscessus dans la mucoviscidose sont très lourds, peu efficaces et souvent mal tolérés par les patients. Or, plusieurs études compassionnelles ont rapporté l’effet bénéfique d’une perfusion de bactériophages (en combinaison avec des antibiotiques) dans le traitement de patients atteints de mucoviscidose, souffrant d’une infection pulmonaire sévère causée par M. abscessus. Cependant, les données décrivant l’efficacité d’action des phages chez M. abscessus restent très éparses et le nombre de phages efficaces sur des souches cliniques reste limité. Ainsi, dans le but d’étende la phagothérapie chez les patients, nous nous proposons de caractériser de nouveaux phages récemment isolés, de déterminer leur activité thérapeutique et de décrire les mécanismes de résistance de la bactérie pour échapper à l’activité lytique de ces phages.

Perspectives :
Si seules des études cliniques menées sur un grand nombre de patients apportera la preuve scientifique de la bonne tolérance et de l’efficacité de la phagothérapie dans le contexte de la mucoviscidose, des études fondamentales telles que celles préconisées dans le cadre de ce projet, restent absolument nécessaires pour optimiser l’efficacité d’action des phages et accroitre notre éventail de phages thérapeutiques pour que davantage de patients puissent rapidement avoir recours à la phagothérapie en cas de besoin.
Ainsi, la seconde année de thèse s’articulera, de façon très logique dans la suite des premiers résultats et selon le calendrier initial, essentiellement autour de deux thèmes centraux : 1) La poursuite des études en rapport avec l’impact du traitement de nouveaux phages dans le modèle zebrafish, précédemment développé dans l’équipe pour tester leur efficacité thérapeutique dans un contexte infectieux; 2) La caractérisation des nouveaux marqueurs de résistance de plusieurs phages, ce qui nous renseignera sur les facteurs bactériens qui sont nécessaires l’infection pour ces phages et sur la spécificité de ces mécanismes. Les résultats issus de cette étude nous renseigneront sur des composants moléculaires inédits gouvernant les interactions spécifiques entre les phages et leur bactérie cible. En résumé, la caractérisation de ces phages, au niveau fonctionnel et génomique permettra d’accroitre le répertoire de phages thérapeutiques destinés à lutter contre certaines formes d’infections à M. abscessus, actuellement réfractaires aux phages disponibles. L’ensemble de ces résultats devrait accélérer la mise en place de futures études cliniques menées sur un plus grand nombre de patients pour apporter la preuve scientifique de l’innocuité et de l’efficacité de la phagothérapie dans le contexte de la mucoviscidose.

Au-delà de ses aspects fondamentaux, les perspectives d’applications médicales issues de ce projet sont bien réelles et les possibilités d’applications en clinique largement envisageables, comme le témoigne plusieurs études récentes (1, 29, 30) qui relatent d’une amélioration générale de l’état de santé des patients avec augmentation des fonctions pulmonaires chez au moins la moitié des patients traités par phagothérapie en complément de l’antibiothérapie. Si ces traitements restent aujourd’hui limités pour un usage à titre compassionnel, ils mettent cependant en avant l’intérêt majeur de la phagothérapie dans le cas d’infections chroniques sévères multi-résistantes. Ces études nécessitent toutefois d’être étayées par des travaux expérimentaux plus approfondis en laboratoire. Dans ce contexte, notre projet s’inscrit dans la logique de ces études cliniques afin de fournir davantage d’éléments fondamentaux permettant de mieux appréhender les interactions et spécificités des phages avec leur spectre d’hôte et de pouvoir mieux optimiser les cocktails phagiques à usage thérapeutiques.

Résultats obtenus :
Nous avons confirmé la très forte activité lytique d’un nouveau phage in vitro et avons montré un effet synergique lorsqu’il est associé à un antibiotique, suggérant qu’il soit possible d’améliorer son efficacité du traitement, si toutefois ces effets sont confirmés dans un modèle animal. Nous avons également participé à la caractérisation d’un nouveau phage, particulièrement efficace sur des souches lisses de M. abscessus et identifié un nouveau gène de résistance au phage thérapeutique BPs. Ces premiers résultats prometteurs ouvrent d’ores et déjà sur des perspectives très intéressantes dans le cadre d’une approche thérapeutique alternative pour lutter contre les formes sévères d’infections pulmonaires causées par M. abscessus dans la mucoviscidose.